DEMANDE DE LA GARDE DES SCEAUX TENDANT A LA CONSTATATION DE LA DECHEANCE DE PLEIN DROIT DE M. LOUIS-FERDINAND DE ROCCA SERRA DE SA QUALITE DE MEMBRE DU SENAT
Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 4 septembre 2001 d'une requête de la garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra de sa qualité de membre du Sénat ;
Vu les articles LO 130, LO 136 et LO 296 du code électoral ;
Vu le code pénal, notamment son article 131-26 ;
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Bastia, siégeant en matière correctionnelle, en date du 10 mai 2000 ;
Vu l'arrêt de la Cour de cassation (chambre criminelle), en date du 30 mai 2001 ;
Vu les observations de M. de Rocca Serra enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 14 septembre 2001 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu,
1. Considérant qu'aux termes de l'article LO 296 du code électoral : « Nul ne peut être élu au Sénat s'il n'est âgé de trente-cinq ans révolus. Les autres conditions d'éligibilité et les inéligibilités sont les mêmes que pour l'élection à l'Assemblée nationale... » ; que selon l'article LO 136 du code électoral : « Sera déchu de plein droit de la qualité de membre de l'Assemblée nationale celui... qui, pendant la durée de son mandat, se trouvera dans l'un des cas d'inéligibilité prévus par le présent code. La déchéance est constatée par le Conseil constitutionnel, à la requête du bureau de l'Assemblée nationale ou du garde des sceaux, ministre de la justice, ou, en outre, en cas de condamnation postérieure à l'élection, du ministère public près la juridiction qui a prononcé la condamnation » ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par arrêt susvisé de la cour d'appel de Bastia en date du 10 mai 2000, M. de Rocca Serra a été condamné à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et cinquante mille francs d'amende, ainsi qu'à titre complémentaire et pour une durée de deux ans, à celle de l'interdiction de ses droits civiques et civils ; qu'à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 30 mai 2001, cette condamnation est devenue définitive, nonobstant l'exercice par M. de Rocca Serra de voies de droit tendant à obtenir le sursis à exécution de ladite décision, la révision du procès pénal, la grâce et le relèvement du condamné ;
3. Considérant qu'en vertu de l'article 131-26 du code pénal l'interdiction des droits civiques emporte l'inéligibilité du condamné ; qu'en vertu de l'article LO 130 du code électoral, sont inéligibles les individus privés par décision judiciaire de leur droit d'éligibilité ;
4. Considérant qu'il appartient, dès lors, au Conseil constitutionnel de constater, en application de l'article LO 136 du code électoral, la déchéance encourue de plein droit par M. de Rocca Serra de son mandat de sénateur de la Corse-du-Sud du fait de l'inéligibilité résultant de la condamnation définitivement prononcée à son encontre,
Déclare :
Est constatée la déchéance de plein droit de M. Louis-Ferdinand de Rocca Serra de sa qualité de membre du Sénat.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 septembre 2001, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud et Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.